Etat de santé des récifs coralliens de La Réunion

 

Les récifs de La Réunion sont d'autant plus vulnérables aux agressions naturelles et humaines, qu'ils sont jeunes et rapprochés du littoral.

•  Avec les années 70 débute la connaissance de ces milieux. Les premières études menées par deux océanographes (Lucien MONTAGGIONI et Gérard FAURE ), dans le cadre d'un Centre Universitaire rattaché à l'Université d'AIX-MARSEILLE ne font état d'aucune dégradation de ces milieux littoraux.

•  Au milieu des années 70, dans la région des récifs de l'Ouest de l'île, alors que la chasse sous-marine se développe de façon anarchique, les pêcheurs côtiers voient leurs prises en poissons de fond s'amenuiser progressivement.

•  En 1977, Claude BOUCHON, Doctorant en Océanologie constate les premiers signes de dégradations biologiques sur le récif de La Saline les Bains. Il s'agit du développement d'éponges perforantes (cliones) aux détriments des peuplements de coraux. Ce sont des filtreurs d'éléments organiques en suspension. Parallèlement les populations d'oursins détritivores se multiplient sur les zones internes du récif. La prolifération de ces types animaux révèle une augmentation chronique d'une charge organique dans les eaux baignant le récif.

EpongeOursin diadème

•  Dés le début des années 80, les signes de dégradation de l'écosystème, en particulier sur les platiers, avec l'effondrement du taux de recouvrement des écosystèmes coralliens sont manifestes ; ils se sont traduits alors et depuis par diverses manifestations de dégradation :

• Une mortalité corallienne de grande ampleur, notamment chez les coraux branchus,

• Une inhibition dans la calcification corallienne, menaçant la construction même du récif,

Algues

• Une diminution de la richesse et de la diversité spécifique corallienne. Ainsi, en 15 ans, la diminution de la biodiversité sur le platier récifal de Saint-Gilles est très nette (Chabanet, 1994 en comparaison avec les données de Bouchon, 1978) : diminution de 25% de la richesse en coraux, régression de 73% du taux de recouvrement en corail vivant,

• Un développement important des algues molles compétiteurs des coraux et indiquant un enrichissement en ions minéraux des eaux ;

• Une modification des peuplements d'oursins, avec raréfaction des individus en zones enrichies en sels nutritifs.

• Une diminution régulière de l'abondance et de la diversité des peuplements de poissons sur l'ensemble des platiers récifaux (Letourneur, in Naïm, 1997). En relation avec les modifications des habitats, le recrutement des poissons également semble affecté, comme l'indique la réduction du nombre de juvéniles dans les secteurs soumis à une pression anthropique,

• Une modification des peuplements de poissons, avec déstructuration de l'organisation trophique au profit des herbivores (Letourneur, 1992), dont l'importance économique est moindre que celle des poissons carnivores.

Il est généralement admis qu'environ 50% des platiers récifaux réunionnais sont perturbés. Naïm (1997) dans une synthèse récente tente de quantifier l'importance des dégradations des platiers. Les résultats montrent que 28% de l'ensemble des platiers de La Réunion sont fortement dégradés

Les conséquences sur le littoral de la régression des récifs sont très visibles, avec notamment un phénomène d'érosion des plages (Mespoulhé et Troadec, 1994) : amaigrissement des plages coralliennes, érosion de la bordure des plages, déchaussement des filaos, variations du profil littoral.

A noter que le cyclone Firinga en 1989 avait détruit à 100% les récifs de St Leu et de St Pierre…

Un Suivi de l'état de santé des récifs coralliens par les élèves du lycée E. de Parny ont permis de recueillir des données complémentaires de 1996 à 1998 confirmant la dégradation des recouvrements coralliens sur le récif de St Gilles et de l'Hermitage;

Afin de suivre plus précisément l'évolution des récifs coralliens, une méthodologie a été mise au point dans le cadre de « l'atelier récif » du PRE-COI, programme régional environnement de la Commission Océan Indien (fondé en 1984 par Maurice, Seychelles, Madagascar, plus Comores et Réunion en 1986), financé à 80% par la commission européenne. Le suivi des récifs effectué est devenu un nœud du réseau mondial (Global Coral Reef Monitoring Network ou GCRMN) mis en placeen 1996 par l'ICRI (International Coral Reef Initiative créé en 1994 dont la déclinaison française ou IFRECOR a vu le jour en 1999 quand la France a pris la présidence de l'ICRI (1999-2000) : chaque collectivité d'outre-mer possède un comité local IFRECOR).

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Le récif est partagé en secteur  : portion homogène du récif du point de vue géomorphologique, environnementale et anthropologique ; sur ce secteur, on définit un site qui sera caractérisé par une station sur le platier et une autre sur la pente externe entre – 6 et 15 m ;

Une station de suivi

Le nombre de secteurs doit être représentatif du récif corallien ; le suivi des stations est annuel et s'effectue également après un évènement exceptionnel.

Relevé des paramètres environnementaux (T°C, salinité, météo, pénétration de la lumière)

Relevé des paramètres biotiques

1) Le comptage des poissons s'effectue sur 50m dans un couloir de 2,5m de part et d'autre du ruban soit : 50x5 : 250 m² ;

1 er passage  : Décompte des gros prédateurs qui sont les plus fuyants (FP) : Lutjans kasmira , Epinephelus fasciatus et Lethrinus harak  : ce sont des piscivores régulateurs ; ils sont indicateurs de milieux peu pêchés …

Lujan KasmiraMacabitCapitaines

2 nd passage  : Décompte des papillons (FC) : C. trifasciatus (FCT)et lunula  : le premier est un corallivore strict et inféodé au zone corallienne riche (Acropora) ; le second est omnivore et se développe aux détriments des papillons corallivores quand le milieu est dégradé et envahi par les algues (FCL) ;

PapillonPapillon lunula

décompte des poissons chirurgiens qui sont des brouteurs d'algues ( Acanthurus. triostegus, Ctenochaetus striatus, et Naso unicornis ) ;

ChirurgienChirurgien rayéNason

et Baliste Picasso ( Rhinecanthus auleatus , mangeurs d'oursins et qui tendent à s'installer dans les milieux dégradés envahis par les algues et développement d'oursins) ;

Baliste Picasso

Le 3 ième passage permet l'évaluation des demoiselles (plus teritoriales) et planctonophages : Dascyllus aruanus et Chromis viridis qui sont inféodées pour leur habitat au coraux branchus de même que Plectroglyphidodon dickii qui est omnivore.

Demoiselle à bandes noiresDemoiselle bleu vertDemoiselle de Dicki

2) Le comptage des populations benthiques

Les différentes catégories

  • corail mort/ vivant :
  • Acropore branchu, digité, submassif, tabulaire ;
  • non acropore ; branchu, encroûtant, foliacé, massif, submassif, solitaire, millepore ;
  • corail mou, éponges, oursins, acanthasters, étoiles autres, ascidie, anémone, gorgone, bénitier, autres ;
  • algues calcaires, dressés, gazonnantes, assemblage algal (gazons plusieurs espèces) ;
  • substrat : vase, sable, débris, blocs, roche

 

Formes coralliennes

•  Scénario 0 : taux de recouvrement par la technique semi-quantitative de Dahl en apnée : 9 périodes de 5 minutes, temps au bout duquel le plongeur note son estimation.

Dahl

•  Scénario 1 : 3 relevés des peuplements benthiques (T1, T2 et T3) :

Scénarion pour le suivi des récifs 

Relevé

•  Scénario 2 :

Quatre quadrats de 1m² de part et d'autres du 0 séparés de 5 m soit 8 au total ; les relevés se font par dessins, photos ou par évaluation de la surface selon la méthode des recouvrement de Dahl.

8

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Les 7 sites : St Gilles L'hermitage Toboggan/ trois chameaux; La Saline les bains Planch'alizé; St Leu La corne et La Varangue; Etang salé les bains; St Pierre Ravine Blanche et Alizée plage; soit 14 stations sont suivies chaque année par l'Association Parc Marin de la Réunion.

Un site de suivi

Les études de suivi des récifs coralliens dans les zones de St Gilles et de St Leu montre une stabilisation du taux de recouvrement des récifs coralliens qui fluctuent au gré des épisodes de blanchissement estivaux ou des périodes pluvieuses ;

Les taux de recouvrement au niveau des platiers et des pentes externes varient d'une station à l'autre :

•  Sur St Gilles la saline, le taux de recouvrement de la pente externe comme celle du platier tend à diminuer au cours des dernières années

Station de pente externe du site de SAint Gilles- l'Ermitage (Trois Chameaux) :

Suivi récif Ermitage

station de platier de Saint Gilles l'Ermitage (Trois Chameaux)Suivi platier Ermitage les bains


•  Sur St Leu, une forte vitalité demeure malgré des épisodes de blanchissement, la pente externe possède des recouvrements supérieurs à 40%.

suivi varangue pente externe

•  A St Leu comme à Etang salé les platiers ont souffert d'épisodes de blanchissement en 2004 conduisant à une réduction du recouvrement corallien et à un développement des algues.

Suivi platier Etang salé

Pour ce qui est des peuplements en poissons, on note que quelque soit la localisation des platiers, une dominance des Pomacentridae (demoiselles) et des Acanthuridae (chirurgiens). En revanche, on est frappé par l'absence de piscivores (mérous, capitaines, lutjans) . Il y a réellement un problème de surexploitation générale sur les récifs coralliens réunionnais.

Population poisson

D'après Suivi de l'état de santé des récifs coralliens 2000- 2002 (L. Bigot) – COI –GCRMN – rapport 2005 – APMR – B. Cauvin (Synthèse 1999-2005) et GCRMN 2008 (Réserve Naturelle Nationale Marine)..

Un atelier scientifique mené par des élèves du Lycée E. de PArny de Saint Paul a permis d'évaluer l'évolution du recouvrement corallien dans la région de Saint Gilles de 2007 à 2009 permettant de faire la comparaison avec des résultats obtenus par d'autres élèves 10 ans plus tôt.

Les résultats à l'échelle Mondiale : Rapports du GCRMN